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02/05/2010

La déchéance du monument du Tertre de Changé...

Une page d'histoire...

 

Maire, élus, habitants de cette commune, ne peuvent ignorer ou enterrer  la page d'histoire de cette bataille du Mans et des combats qui se sont déroulés les  10, 11, 12 janvier 1871 dans ce village de Changé. De nombreux historiens, mémorialistes, militaires les ont décrits avec précision. Ce plaidoyer se bornera donc à ne citer que des extraits d'un opuscule - paru lors de l'édifications de ce mémorial - intitulé « Le monument du Tertre de Changé, 23 octobre 1910 », rédigé par Robert Triger. Il définit bien les fondements moral et matériel de celui-ci.

« le combat du Tertre de Changé a été - après le brillant fait d'armes d'Auvours - l'un des plus honorables des combats partiels dont l'ensemble a formé la bataille du Mans. »

« Il y eut là une glorieuse résistance dont il est désirable de perpétuer le souvenir, en rendant un juste hommage aux nombreux soldats frappés sur ce point du champ de bataille. »

« Les combats du Pavillon et du Tertre de Changé ont été, avec celui d'Auvours, les plus acharnés et les plus sanglants des trois journées de la bataille du Mans. »

Au cimetière, reposent 254 soldats Français ou Allemands et au carrefour du Chemin aux Bœufs et de la route de Changé, furent ensevelis quarante-cinq soldats.

Rappelons que Changé fut également la position tenue, entre autres unités, par le 33ème Mobiles de la Sarthe, ainsi que le bataillon de mobiles de Mamers qui se battait tout près, sur la route de Parigné. Ce lieu de bataille où se déroula une page d'une tragédie nationale constitue donc également un lieu de mémoire départemental.

 

CPA Changé Le Tertre dessin copier.jpg

 

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Et aujourd'hui...

...quelles sont les motivations qui pourraient militer pour la remise en place  de ce monument ?

Juridiquement

Outre les responsabilités morales rappelées plus haut, le terrain d'assiette du monument et le monument restent propriétés du Souvenirs Français. Juridiquement, nous avons donc la situation suivante : une voirie publique qui englobe un terrain privé (certes modeste) et un monument privé, désormais mutilé, sur le domaine public de la commune... L'imbroglio juridique est réel.

Historiquement

Ce mémorial, patrimoine historique, marquait un lieu de mémoire, témoin d'un conflit ayant durement frappé la commune, le département, le pays et qui méritait le respect. Il représentait, pour les générations actuelles et futures, la matérialisation d'un devoir de mémoire sur cette guerre et celles  qu'elle engendra ensuite.

Face gravée tournant le dos au passant, plaque explicative de marbre et entourage en fer forgé disparus, socle éliminé, il se trouve ainsi ravalé au rang de mobilier urbain anonyme, muet et  dérisoire.

 Du point de vue paysager

Ce monument constituait, avant son déplacement, un élément structurant du paysage, un repère visuel fort dans un environnement en mutation, un point focal intéressant. Sa suppression tend à banaliser le site. Le projet réalisé est un aménagement routier " pur et dur ", plaqué sans autre considération environnementale (intégration au paysage, volet historique, prise en compte des liaisons douces). Ce carrefour symbole devient équipement routier insignifiant.

 
IMGP0286.JPG

Proposition

Les emprises de voirie, larges et généreuses, permettaient une recomposition adaptée afin d'intégrer la reconstruction du monument à l'identique et de le réintroduire à peu de chose près, dans l'axe visuel qu'il possédait à l'origine, sans obérer les fonctions routières du site, nécessaires à l'évolution actuelle.

 

Tertre Rd Point 2010.jpg

Conclusion :

A l'image d'autres aménagements de caractère, ambitieux, dans la commune, ce site et ce monument mériteraient attention par ce qu'ils représentent dans la mémoire collective du village.

Avec simplicité et honnêteté, la commune s'honorerait de reconsidérer sa position et de réparer cette mauvaise appréciation dans la conduite du projet qu'elle a mis en oeuvre.

Il convient de laisser la conclusion au maire de Changé, M. Lebert, ce 23 octobre 1910, lorsqu'il accepte « comme un dépôt sacré » la garde de l'édifice qu'on lui confie et qu'il déclare «  Si des mains pieuses ont assemblé ces pierres, des mains fidèles leur assureront à travers les âges la pérennité qui convient aux douleurs et aux gloires françaises qu'elles affirment noblement »

Jean-Luc BOULARD

Copie de IMGP0284.JPG

 
 

 

 

20:48 Écrit par Ré-action dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : guerre 1870, bataille du mans, chanzy, changé |  Facebook |

Commentaires

Je suis stupéfait du peu de cas qu'il est fait dans cette commune, du souvenir de nos anciens, morts pour la France.
Ainsi relégué sur un emplacement bien moins visible, ce monument de notre identité nationale tombe dans l'oubli.
la liberté n'aurait-elle donc plus de sens pour les villageois de Changé?
Nos soldats meurent encore aujourd'hui pour la défendre; souvenez-vous en!

Écrit par : boularne | 06/05/2010

Je suis scandalisé de ce que, pour des raisons plus ou moins économiques, une municipalité se permette de traiter de la sorte ce témoignage d'une page de notre histoire. Aurait-on honte aujourd'hui du sacrifice de nos anciens?
J'élève cette protestation en l'honneur des 450.000 membres de la Société des Vétérans de 1870-1871 dont une Section a participé à l'érection de ce monument.

Philippe Vraine
Président du Souvenir de la Société des Vétérans de 1870-1871.

Écrit par : SSV 1870-1871 | 08/05/2010

Bonjour Monsieur Boulard,

Moi-même passionné par le conflit de 1870-71 et plus particulièrement la Campagne de la Deuxième Armée de la Loire, j'ai été plutôt déçu de voir la façon dont a été traité le Monument du Tertre haut lieu de la Bataille du Mans comme vous l'avez rappelé.

A l'époque ou le monument avait complètement disparu (avant les travaux donc), j'ai pris contact avec le Président du Souvenir Français de la Sarthe. Sa position était que le monument était rendu dangereux de par la circulation et "qu'il y avait eu assez de morts à cet endroit sans en rajouter..." (texto !).

L'argument peut "tenir la route" (si j'ose dire !) mais ne pouvait-on pas arriver à un bon compromis pour le monument ? (disposé ailleurs ; mis en valeur ; plaques redisposées ; etc...).

Grosse déception donc, d'ailleurs s'il y a une pétition je suis preneur.


Cordialement, Stéphane PIOGER

Écrit par : pioger | 08/05/2010

Oui c'est triste de voir ça quand on sait combien de jeunes Français sont morts pour leur patrie... en France, on préfère toujours se souvenir des gendarmes qui ont fait la "rafle"...

Écrit par : Hugues | 19/05/2010

M. Boulard, bravo pour votre initiative à propos du monument aux morts. Quelques remarques sans importance de ma part:
1° L'incident de la mairie m'a remis en mémoire un fait qui m'avait bien intéressé naguère... C'était du temps de Napoléon III, plus précisément à l'époque de la guerre de Crimée, qui s'étendit de l'Alaska à l'île de Sakhaline. Le port principal des Russes était à Pétropavlovsk, qui donne sur le Pacifique septentrional... Paris et Londres décident d'une opération contre la place, et l'ordre arrive aux bâtiments français et anglais stationnés au Callao (Pérou) de foncer... On est en avril-mai 1854. On cingle aux Hawaii, puis sur Pétropavlovsk août-septembre). Vous imaginez les conditions d'hygiène, qui décimeront bientôt les équipages (scorbut, typhus, etc.)... On débarque le 4 septembre. Les Anglais refusent bien sûr de collaborer avec les Français (comme en Méditerranée, comme sur les côtes japonaises ou la manche de Tartarie). Les politiciens français de métropole avaient prédit que les Russes vivaient sous le joug d'un despote cruel, qu'ils se soulèveraient contre lui, acclameraient leurs libérateurs, fonderaient une République démocratique; ils avaient mauvais moral, leurs armes étaient mauvaises, leur commandement inepte, etc... Sur place, c’est au contraire ce qui caractérisa les Alliés. Et le débarquement tourna à la confusion (absence de chef commun, pas de stratégie, sans parler des rivalités anglo-françaises et de la supériorité des forces terrestres russes), puis au jeu de massacre. On abandonna les blessés, etc. En moins de deux heures tout était plié, et les survivants se rembarquèrent... Cette fois, on gagne San Francisco, les officiers et hommes de plus en plus malades, et déprimés... San Francisco, c'est -au point de vue climat- encore pire que les Hawaii. Un détail: lorsqu'un tremblement de terre ravagera les côtes japonaises entre -disons- Tokyo et Osaka, il se produira, par répercussion, une montée des eaux à San Francisco... De San Francisco, les Français retournent au Callao dans des conditions misérables. Là, leur amiral meurt de la maladie qu'il traînait depuis le début de la campagne. On a, entre-temps envoyé un remplaçant... Nouvelle expédition alliée, mêmes dissensions entre Anglais et Français (ce sera pire en manche de Tartarie, et en Alaska les Anglais pactiseront avec les Russes...contre les Français)... Second débarquement, en avril 1855. Les Russes se sont éclipsés, et l'on ne rencontre que deux ou trois citoyens américains qui glandent, et des bandes de chiens du Kamtchatka... Vous imaginez, Monsieur Boulard, ce qui se passe dans les têtes et les corps, depuis un an en mer, sous des climats tellement différents. Une patrouille repère bientôt un cimetière: "Les morts de la journée du 4 septembre avaient été inhumés à l'extrémité nord de la ville: les Russes d'un côté, avec la croix grecque; les Français et les Anglais de l'autre, avec la croix latine"... Pour l'amiral français, une chose s'impose sans retard: il fait entourer l'emplacement "d'une solide palissade qui, je n'en doute pas, sera respectée". Elle le fut effectivement. Voilà, Monsieur Boulard. Sur les côtes du Kamtchatka, on rend hommage aux morts, et on entoure leur sépulcre commun d'une palissade (nb: avant les bombardements alliés de 1854, les Russes avaient protégé la statue de La Pérouse...). Qu'est devenue la palissade de Changé?.. Mise en pièces, vendue à quelque ferrailleur bessarabien?.. Qu'est devenu l'honneur du conseil municipal de Changé et des membres du Souvenir Français (ah! cette rigolade...) qui se sont commis dans le scandale que vous rapportez en termes bien trop mesurés? Décidément, Changé est bien loin des mœurs du Kamtchatka...Vous imaginez, Monsieur Boulard? Les sonneries aux morts, russe, anglaise, française, russe encore. La palissade de Pétropavlovsk... Et le monument de 1870, enlevé en catimini par la mairie du Changé, en 2010. Mœurs de marlous: pas vu, pas pris. Et je suppose que tous ces édiles et autres gobergeurs de petits fours du 14 Juillet, en compagnie de Ma'âme la sous-préfète, pleurnicheront: C'est pas moi!..
2° La photographie du monument -comme dégagé à coups de pied- me rappelle vaguement une chanson d'Alain Bachung (orthographe probablement erronée), quand il évoque ces clebs qui gênent qu'on abandonne au bord de la route au mois d'août en Espagne.
3° Dernière remarque, si besoin est. Les combats du Mans sont constitutifs de l'Idée Républicaine. Les soldats ne se battaient pas pour un empereur ou quelque autre tyran -mais pour la Démocratie, la République, pour la Liberté, l'Egalité, la Fraternité.
Sincèrement

Écrit par : Jean Nerle | 22/05/2010

Je dois aux Manants du Roi de connaître l'affaire de Changé, tellement significative. Les gens modernes se font un devoir de l'amnésie, et par là de l'inexistence. A force de vouloir "tourner la page", et d'avoir en effet tourné toutes les pages, il ont jeté tout le livre -et, privé de toute conscience d'eux-mêmes, glissent vers le néant, où ils nous entraînent. Le maire de Changé ne comprend rien à cela, comme tant d'autres : mais il doit rester possible de le convaincre. Tenez bon ! Vous avez toute ma confiante admiration / PMC.

Écrit par : Paul-Marie Coûteaux | 04/06/2010

Un pays qui oublie ses héros, même malheureux, surtout malheureux, se condamne à ne plus voir se lever de nouveaux défenseurs face aux prochaines invasions.
Ce n'est pas tourner la page, celle des conflits franco-allemands, que de reléguer aux oubliettes ceux qui se sont battus pour leur pays. C'est au contraire encourager les futurs agresseurs, quels qu'ils soient.
Il faut se battre pour la mémoire. Je ne sais pas si l'on peut "convaincre le maire de Changé" comme l'imagine le très optimiste PMC : on peut au moins attirer l'attention de nos concitoyens.
Bravo pour votre initiative.

Écrit par : Jean-Gilles Malliarakis | 08/06/2010

Dommage, l'aménagement de ce carrefour routier ne devait je pense poser aucun problème pour intégrer le monument, mais au contraire c'était l'occasion de le mettre en valeur. C'est raté. Ou alors est ce une volonté d'oublier un passé certes peu glorieux pour notre prestige national, (mais pas pour ceux qui ont été envoyés au casse-pipe)?

Écrit par : Bauds | 09/06/2010

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